La vie professionnelle en Italie, en voilà un vaste sujet. Tellement vaste qu’on ne vous parlera que de notre propre expérience agrémentée d’anecdotes. Tout d’abord, parce qu’on n’a pas fait Sciences Po et ensuite parce que sincèrement, qu’on se le dise, ça serait plutôt ennuyant de se perdre dans les méandres du lavoro mafioso… euh italiano! Nous sommes arrivées en Italie après diverses expériences professionnelles à l’étranger et nous étions prêtes à nous lancer dans de nouvelles aventures ! (petit aparté, nous avons débuté notre carrière italienne grâce à un contrat VIE cela signifie Volontariat International à l’Entreprise, qui permet à tout jeune français ou ressortissant de l’Union Européenne, âgé de 18 à 28 ans de réaliser une mission à l’international pour une entreprise française. L’organisme en charge des VIE s’appelle Business France. Pour plus d’informations, n'hésitez pas à parcourir leur site internet : https://export.businessfrance.fr/formule-vie/vie-en-bref.html )
Revenons-en à nos moutons. Avant de débarquer à Turin, nous avions déjà étudié l’italien et ça, on doit bien l’avouer, ce n’était pas un luxe. C’est même plutôt rassurant quand tu arrives dans une entreprise, un poids en moins. Le premier jour dans une entreprise italienne est tout de même assez sportif, et pour ton estomac et ton petit cœur, car sans t’en rendre compte tu ingurgites une quantité astronomique de CAFÉ. Car oui, le café étant une religion, tous tes collègues te proposent un café, sauf que toi en tant que petite française tu es habituée à ton « café cafetière » alors entre la moka, la machine Nespresso et les cafés du bar tu es à deux doigts de faire une syncope derrière ton bureau. A partir de ce moment, tu comprends néanmoins qu’il va falloir apprendre à dire non, du moins au café (ouai les petits gâteaux qui accompagnent sont toujours les bienvenus, surtout ceux avec du beurre)! Quand tu débarques en tant que petite nouvelle, forcément tout le monde veut savoir d’où tu viens, ce que tu as fait avant, pourquoi tu es là mais surtout, surtout LA question que tout le monde se pose : Tu es venue à Turin pour l’A.M.O.U.R ? « Allez, dis-nous la vérité ». Oui les italiens aiment poser des questions personnelles et d’ailleurs en début de journée ou avant les réunions il y a toujours un moment « comment vont tes enfants ? »…
Non je n’ai pas d’enfants mais un chat trop mignon, vous voulez voir une photo ?
Vient ensuite la première réunion et alors, là, se passe un phénomène plutôt hors du commun : tout d’abord, les italiens ça parlent fort, et parfois très fort. Ils n’ont pas de difficultés à hausser le ton et couper la parole lorsqu’ils sont en désaccord (ou même en accord), et pourtant à peine la réunion finie l’animosité se calme et les conversations reprennent sur les enfants, les vacances, le chien etc. C’est assez perturbant au début,
car ce climat tendu peut être stressant puis sans prévenir, tel le rayon de soleil après la tempête, l’atmosphère se détend et alors tu ne comprends plus trop bien si ils sont bipolaires ou schizophrènes… Allez, on plaisante ! Lors des réunions, le plus surprenant reste quand même la gestuelle. Tout d’abord, si vous ne le savez pas encore, les italiens gesticulent. Certains gestes ont remplacé la parole, oui oui on vous assure. Alors imaginez lorsque le directeur prend la parole, il explique un projet, une idée, ce que vous voulez, puis termine sa phrase en faisant un geste. Et là, toi tu regardes l’assemblée, tu te demandes ce qui ne tourne pas rond chez lui, puis tu vois que tout le monde a compris, l’un surenchérit même et finit sa phrase par un autre geste. Le combo ultime est quand la tension monte et que les fins de phrases sont des onomatopées du style « Oooh » « Eeeh » accompagné d’un petit geste… Non attendez, le combo ultime est quand la tension monte, que ton collègue se met à parler dans son dialecte régional et qu’il gesticule. Là, concrètement, tu as le regard hébété, tu te demandes où est-ce que tu as atterri et tu n’as qu’une seule envie c’est de te lever et de leur demander « Mais What The Fuck? » ou la version italienne « ma che cazzo ? » Mais à aucun moment ne te viendrait l’idée de gueuler en français, au contraire, tu en rirais presque.
Au départ, c’est assez curieux mais avec le temps on s’y habitue. On apprend la signification des gestes et on commence à comprendre quelques mots de dialecte ! En parlant de dialecte, une chose pas forcément évidente lorsque l’on commence à travailler en Italie et que l’on a à faire avec des clients et fournisseurs provenant de toute l’Italie, ce sont les conversations téléphoniques. Oh oui, je vous mets bien au défi de comprendre quelque chose avec un sicilien au téléphone. Déjà parce qu’ils ont beau faire l’effort de te parler en italien, (oui c’est un sacré effort) pour certains leur accent est tellement fort qu’il est juste impossible de tout déchiffrer. Je vous laisse imaginer lorsqu’il s’agit de négocier les termes d’un contrat… Alors la solution la plus simple est encore de s’envoyer des mails. Et vient alors l’épellation de l’adresse e-mail. AH.AH.AH. Etant donné qu’il y a quand même peu de chance pour qu’ils écrivent correctement ton nom et ton prénom à la consonance si française (merci à nos parents pour la complexité de nos noms de famille), tu préfères dire « donnez-moi votre adresse mail ça sera plus simple ». Tellement plus simple oui, surtout quand la personne au bout du fil te dit « d’accordo, allora Verona, Ancona, Trieste, Napoli, Domodossola, Bari, Imola Milano, Torino, chiocciola, Empoli, Otranto, Domodossola, Palermo, hotel, Napoli, Livorno… Et là tu te dis, ok le mec n’a rien compris, il est en train de me faire la liste de ses destinations préférées mais moi je voulais son adresse mail pour lui envoyer un e-mail. Alors, sachez que lui le monsieur ou la dame ou bout du fil a bien compris la requête et est en train d’épeler chaque lettre de son adresse e-mail avec les villes italiennes. Sans t’avertir du style V comme Verone… ou Véronique en France. Non ils déblatèrent tous les noms des villes et toi tu dois écrire sur ton bout de papier uniquement la première lettre. Evidemment, les premières fois, tu galères à écrire « Verona, Trno, Acon… Euh, vous pouvez répéter ? »
Travailler en Italie et à travers l’Italie c’est aussi savoir s’adapter à différentes cultures
dans un seul et même pays. Et oui, sur le plan professionnel la différence est également marquée, au Sud tout est fait plus « tranquillement », on ne vous dit pas qu’ils ne travaillent pas mais ils sont à la cool. Et surtout, s’il y a un problème ils te disent qu’ils vont trouver une solution et ce phénomène est surtout propre à cette très jolie île sicilienne. Mais alors attention, veillez à la solution trouvée, c’est un conseil ! Parce qu’une solution, ils vont trouver soyez-en certains mais ce n’est pas garantie que ce soit la meilleure ou du moins celle qui vous convient. Travailler en Italie c’est aussi l’apprentissage de la négociation, tout le temps et pour tout. Et là encore, bien souvent plus au Sud. Vous pouvez être certain que si vous n’êtes pas de la région le prix est gonflé et après quelques négociations soit de la part d’un collègue de la région soit nous-mêmes mais difficilement, on arrive à avoir la même prestation avec parfois -40% du prix initial. Ah ces italiens ! Encore une fois il vous faudra redoubler d’effort et raconter votre vie privée avant de pouvoir entamer les vraies négociations. Retenir les noms des enfants et petits-enfants avec les dates clés de mariages, baptêmes, rentrée scolaire, premier caca dans le pot, fait partie de notre quotidien et est même essentiel pour garder de bonnes relations. Notre mémoire n’étant pas infaillible et pour éviter de potentielles gaffes, ça donne des noms à rallonge sur le téléphone du genre « Chiara lunettes roses sourcils tatoués »
De manière générale, les italiens travaillent en moyenne 40 heures par semaine, les horaires sont les mêmes qu’en France avec peut être tout de même une tendance à la pause repas réduite. Comme en France il y a cinq semaines de congés payés plus d’autres avantages en fonction des entreprises. Ce qui change le plus dans la façon de travailler italienne, ou du moins ce qui est ressenti dans nos entreprises, c’est le rapport à la vie privée des personnes. Tout d’abord car les collègues et même ton supérieur s’intéressent à ta vie personnelle, à chacun de voir comment gérer la situation, mais lorsque tu as un souci d’ordre privé, tu peux en parler et cela est réellement considéré. Travailler en Italie, c’est parfois aussi pousser des gueulantes sur des injustices ou des
pratiques un peu douteuses mais qui ici sont acceptées. C’est aussi se révolter car les syndicats au sein des petites entreprises sont inexistants et employés comme employeurs ne semblent pas vraiment les considérer. Ce qui est tout de même dommage puisque l’Italie évolue constamment sur le droit du travail mais personne n’en sait rien. Travailler en Italie c’est se rendre compte de tous les avantages que nous offre l’Etat Français, que ce soit en termes de protection sociale, formation, accès à l’emploi, indemnités chômage… Et Ô combien la France est un peuple rebelle !
N’hésitez pas à partager avec nous vos expériences de travail à l’étranger ;)
Cet article participe au RDV #HistoiresExpatriées organisé par www.afrenchinmexico.com
Ciao Maëva, oui on était inspirées pour cet article... Il faut dire que c'est notre quotidien depuis deux ans :)
Tu étais inspirée! J'ai appris beaucoup de chose, je ne suis pas du tout familière avec l'italie. mon anecdote préférée c'est celle des e-mails et des villes haha!
https://maevasmapamundi.com